Dans un monde présenté comme le théâtre d’une compétition globale sans merci où seuls réussissent les territoires les plus attractifs, les Métropoles, nouveaux avatars du progrès moderniste, incarneraient le modèle de développement le plus abouti, conciliant qualité des espaces de vie, exigences de performance, ainsi que rayonnement culturel.
Ce manifeste est à la fois une critique radicale et une contre-proposition étayée à cette vision héritée de la pensée productiviste de l’aménagement du territoire, elle-même au fondement de crises pleinement emboîtées, à la fois écologique, sociale et politique. Il revendique le « lieu » (de vie, de ressources, de bien-être etc.) comme alternative fondamentale et entend à cette aune repenser (repanser) les relations que nouent les sociétés humaines, entre elles et surtout à l’écologie.Ce manifeste est le fruit d’un travail mené depuis les premières Journées du réseau des territorialistes français, dédiées aux Communs territoriaux et organisées à Lyon les 23 et 24 mars 2016.
Notre constat est que l’écocide en cours remet profondément en cause notre rapport dual au monde où l’humain serait le seul sujet et l’environnement une somme d’objets. Il nous oblige à reconsidérer nos cadres de pensée et d’action, fondés sur la promesse d’un progrès éternel échappant à toute contingence de nature. Le dérèglement climatique, la 6ème extinction de masse, l’exploitation des ressources… nous rappellent le caractère funeste de nos manières de vivre, et plus largement que les temps humains et non-humains sont bien confondus, nous obligeant en retour à re-panser les liens vitaux à nos milieux en reconsidérant fondamentalement nos propres habiter de la terre.
Nos convictions sont que les lieux habités sont les espace-temps de la préservation de tels milieux écologiques de vie. Ces milieux sont des mondes communs où s’expérimentent de nouvelles pratiques socio-écologiques, économiques, sociale et politiques, et ce autour d’une dynamique autonomiste unissant les communautés humaines et leurs écosystèmes. Cette dynamique s’inscrit dans une vision de solidarité inter-locale, de coopération entre espaces et espèces à l’échelle planétaire. Elle implique un engagement renouvelé de chacun.e à travers ses gestes ordinaires et ses pratiques sociales, dans des modes de vie quotidiens et des imaginaires de la transformation, ou encore dans des enquêtes immersives de terrain et des formes inventives de recherche-action.
Notre objectif est d’accompagner et d’aider à diffuser les initiatives qui se multiplient en réaction à la métropolisation, et de démontrer que ces expérimentations représentent une réelle alternative, radicale, pour (ré)habiter la terre, en réaffirmant notre co-appartenance au vivant et à ses milieux terrestres comme biorégion : éco-lieux et leurs communautés de vie, fermes sociales et la diversité de leurs partages, coopératives et leurs réseaux de proximité, nouvelles formes d’auto-gestion et leurs auto-constructions…
Nos actions cherchent à faire connaître par l’information et surtout la mise débat, par les croisements d’analyse et surtout la mise en recherche-action les enjeux relatifs aux communs de l’habiter écologique. Nous appelons chacun.e, individuellement ou collectivement, à partager ses réflexions, approches et expériences, à articuler ses initiatives et à produire des savoirs et savoir-faire nouveaux pour ré-empuissantiser l’agir individuel et collectif. À cette fin, notre réseau anime ce site et développe des actions dans différentes régions françaises (Occitanie, Massif Central, Cévennes, Alpes…), en associant étroitement chercheur.e.s statutaires comme non statutaires, collectifs d’habitant.e.s et communautés, praticien.ne.s et groupes d’étudiant.e.s.
Réseau des Territorialistes 